Histoire et généalogie des Laurendeau d'Amérique

et de leurs familles alliées

Sous le Régime français.

les premières générations de Rolandeau/Laurendeau en sol d'Amérique

par Louise Authier et Jean Laurendeau, Garde-Mémoire, Montréal.

Première Partie

Jean Rolandeau et Marie Thibault

Les premiers ancêtres de tous les Laurendeau d'Amérique

Nos premiers grands-parents à s'établir sur le sol d'Amérique

dessin de Jean Rolandeau

Mariage de Marie Thibault et Jean Rolandeau petits Bonheurs du temps Jadis

Saint François de Montmorency-Laval, Basilique Notre-Dame de Québec, Église Notre-Dame-des-Victoires, vue de Québec en 1699.

Plan travail

007.
Le mariage de
Marie Thibault et Jean Rolandeau

01. On ne se marie pas n'importe comment, on a de la classe, on sait s'y préparer

Jean Rolandeau se marie avec Marie Thibault le 4 avril 1680. À cette époque, les habitants voyagent peu et leurs périples dépassent rarement la ville, les côtes ou les paroisses voisines. On choisit habituellement son conjoint dans son "coin de pays"1. Par contre, la règle de ces temps anciens ne s'applique pas à nos tourtereaux2.

Jean, du haut de son promontoire fluvial de Pointe-à-la-Caille (aujourd'hui Montmagny), était parvenu à dénicher sa perle rare dans la Seigneurie de Maure2a (aujourd'hui Saint-Augustin-de-Desmaures).

De prime abord, le pèlerin contemporain ne ressent pas les difficultés rencontrées par le voyageur de ces temps éloignés. C'est pourquoi, je me suis permis une recherche Google. Ces experts du planisphère informent que la durée du trajet, à pied, est d'un peu plus de 16 heures. Bien au fait du temps requis pour visiter sa dulcinée, il est amusant de penser que l'ami Jean développait ses mollets, en marchant dans les sentiers rocailleux. Il gonflait ses biceps, en pagayant pour traverser le fleuve St-Laurent couvert de vagues et de vents. Ces ondes aux traîtres courants se moquaient éperdument de son embarcation, qui n'avait rien des allures que possède le submersible moderne. Mais aussi . . . permettez que je m'attendrisse . . . en imaginant la belle Marie, totalement amoureuse, fortement impatiente, naturellement inquiète par l'absence de son homme. Au quotidien, elle s'exerce à une ardente gymnastique: l'étirement du cou et l'écarquillement des yeux. Elle farfouille les horizons, la charmante Marie. Elle soupire infiniment souvent et scrute la pointe du chemin. Elle espère entrevoir le haut du sac à dos de son futur. En ces temps-là, ami lecteur, on avait le temps de prendre son temps3.

Il était d'usage que l'homme se prépare à recevoir son épouse. Vu que les femmes à marier n'étaient pas légion, certains devaient faire carême un peu plus longtemps que d'autres. Pendant l'attente, l'homme de la campagne devait accumuler un petit capital indispensable, pour faire face à l'entretien du ménage à venir. Il s'affairait à bâtir sa petite maison4 et à défricher les six ou huit arpents nécessaires à son établissement5.

Entre le moment où Jean arrive au pays et l'année de son mariage, il faut compter 15 ans. Nous présumons que ses occupations (soldat, chaîneur) et le défrichage de 2 concessions (Dombourg et Pointe-à-la-Caille) étaient le chemin qu'il devait obligatoirement suivre avant de démarrer sa nouvelle vie avec sa future épouse.

Généralement, la célébration religieuse est suivie de la noce . . . qui est la plus grande fête . . . encore plus importante que celle du baptême. Dans ce milieu rude où la vie quotidienne est souvent difficile, les occasions de réjouissances sont plutôt rares; on profite donc de toutes celles qu'on a. Un mariage est l'événement idéal pour festoyer, d'autant plus que non seulement toute la parenté y est invitée, mais aussi tout le voisinage . . . Le repas de noces se tient à la maison du père de la mariée . . . les femmes, comme les hommes de tout âge, mariés ou non, vont manger, boire, chanter jusqu'au lendemain6.

Autour des années 1960, Wilfrid Laurendeau, mon généalogiste préféré7, écrivait cette note Marie Thibault était l'ainée d'une famille de six enfants qui n'étaient peut-être pas au mariage à l'église vu la grande distance et la difficulté des chemins à cette époque, mais qui prirent certainement part à la fête de famille qui remplit le reste de la journée.

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02. Le mariage à l'église

Dans l'ordre des choses qui suivent, vous rencontrerez:

  • Petit écrit "préambuleux ☀ "
  • Le registre de l'église Notre-Dame de Québec ouvert à la page du mariage Thibault/Rolandeau8
  • L'acte de mariage agrandi8
  • La transcription de l'acte de mariage

Le préambule

Dès que la date du mariage est fixée, on doit procéder aux fiançailles. Celles-ci devaient obligatoirement être faites à l'église, sous peine de péché, devant curé et témoins. Toutefois, trop souvent les fiancés se comportent comme s'ils étaient mariés. Donc, vers 1685, l'Église abandonne ce rite obligatoire9.

Aussi, les fiancés doivent veiller, moyennant paiement, à la publication des bans, pendant 3 semaines consécutives, lors de la grand-messe du dimanche. La publication des bans se veut une annonce publique du mariage pendant laquelle l'officiant demande aux gens présents de dénoncer s'ils jugent que ce mariage ne peut avoir lieu. Exceptionnellement, contre une somme d'argent, on peut obtenir de l'évêque la dispense de 2 bans9. Cette dernière option fut utilisée par nos premiers ancêtres. Pas de temps à perdre, on a assez poireauté, que devait dire Jean à sa lumineuse Marie.

Le registre de l'Église

Registre Notre-Dame de Québec

Émerveillement . . . enchantement . . . découvrir un document qui a été vu et touché par l'ancêtre . . . du bonheur plein les cellules.

En ce temps-là, dans les églises, il fallait être à son affaire, car de méchants garnements tramaient des malveillances innommables, des cruautés portées bien en bas de la ceinture10. . .

L'Acte de mariage

Acte de mariage Thibault/Rolandeau

Transcription de l'acte de mariage signé par le curé De Bernières

Le vingt quatrième jour du mois d'avril de l'année mil six
cent quatre vingt après publication de deux bans de
mariage faite le vingt deuxième et le vingt troisième du présent
mois d'entre Jean Rollandeau habitant de la Seigneurie
de St Luc, fils du déffunct Louis Rollandeau et de Laurence
Chauveau ses pères et mères du bourg et paroisse de Marsilly
Évesché de la Rochelle d'une part. Et Marie Thibault
fille de Michel Thibault et de Jeanne Soyer ses pères et mères
de la Seigneurie de Maure, Évesché de Québec d'autre part
et ne s'étant découvert empeschement. Nous, Henry de
Bernières, Vicaire général de Monseigneur L'Évesque et curé
de l'Église paroissiale de Notre-Dame de cette ville, les ayant
dispensé du troisième ban, les ayants en la dite Église interrogé
et leur consentements mutuels par nous pris, les avons par
parole de présent conjoints en mariage en présence de Michel
Thibaut père de l'épouse, Jean de Lastre habitant de Dombourg,
Pierre Girard habitant de la rivière des Roches et de Pierre
Jonqua11 habitant de la rivière du Sud, et ont les dits époux et
épouse et témoins déclaré ne scavoir signer de ce _____________12
suivant l'Ordonnance
H. DeBernières13

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03. Le contrat notarié

Au début d'avril, Jean Rolandeau, habitant de la Seigneurie de Saint-Luc, diocèse de Québec, se prépare afin de rencontrer le notaire Gilles Rageot14. Jean, fébrile, lui a demandé de préparer l'acte notarié pour son prochain mariage avec Marie Thibault, de la Seigneurie de Maure. Confiant, l'ancêtre Jean a maintenant plusieurs raisons d'espérer que le notaire Rageot lui dressera un bon contrat de mariage. La veille de la séance des signatures, au moment où le soleil tombe, il jongle à tout cela, en rêvassant le long du chemin du Roy. Après tout, tranche-t-il, Talon n'a certainement pas nommé Rageot au poste de Notaire Royal parce qu'il est incompétent. Puis il s'arrête chez son voisin et ami Blanchet. Les deux complices, adossés à la clôture de perche, examinent encore une fois la situation et arrivent à la conclusion qu'il ne peut y avoir de crainte avec le savoir-faire de Rageot puisqu'il pratique son métier de notaire depuis 1666.

En ce merveilleux mardi14a, sous le doux soleil du matin, marchant et dansant vers la maison du notaire, au son des mésanges et des tourtes, Jean, 30 ans, réfléchissait à la chance de Rageot qui est marié avec la belle Marie-Madeleine Morin. Au décès de Noël, son père, elle reçut le noble titre de Seigneuresse de Saint-Luc et lui, sans crier gare, favorisé par le sort, monta automatiquement d'un cran dans l'échelle sociale. Quelle veine!15.

Arrivé chez le notaire Rageot, ils échangèrent sur différents sujets et le notaire se mit à lire15a ce qui suit : Le résumé suit l'acte du notaire Rageot.

Contrat mariage Rolandeau 1680 page 1

Contrat mariage Rolandeau 1680 page 2

Résumé du contrat de mariage

Entre Jean Rolandeau, habitant de la Seigneurie de Saint-Luc, diocèse de Québec, fils de feux Louis Rollandeau et de Laurence Chauveau, du bourg et paroisse de Marsilly, évêché de La Rochelle, et Marie Thibault, fille de Michel Thibault et Jeanne Soyer.

Au moment du mariage, les deux parents de Jean Rolandeau sont décédés. Des amis communs sont présents chez le notaire: Nicolas Sarazin, Catherine Normand (femme de Labrière), Jeanne de Lettre (femme de Catignon garde du magasin du Roy), Étiennette Normand (fille de Labrière). Marie Thibault reçoit de son père, la veille des épousailles, une vache pour services rendus. Aussi elle reçoit une dot selon le douaire coutumier ou, à son choix, une somme de 300 livres, payable une seule fois. En cas de décès, ils font l'un à l'autre, donation respective et irrévocable de tous leurs biens meubles et immeubles, au survivant.

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04. Histoire des églises Notre-Dame

La Basilique-Cathédrale Notre-Dame de Québec a été construite en 1647. Première cathédrale catholique en Amérique du Nord, elle a été ravagée par les flammes deux fois au cours de son histoire. Chaque fois, elle a été rebâtie sur les murs précédents. Elle témoigne de la foi, de l'histoire et de la tradition d'un peuple qui a traversé quatre siècles avec dignité et courage.

L'église Notre-Dame-des-Victoires s'élève sur le site de l'Habitation de Samuel de Champlain, là où commença le peuplement de la Nouvelle-France. Construite en 1688, l'église souffrit grandement des bombardements de 1759. On put cependant la reconstruire sur ses murs. Ici se mêlent histoire et spiritualité, reconnaissance et supplication. Ici, vous êtes sur les lieux mêmes du berceau de la civilisation française et de la foi catholique en Amérique du Nord.

Je fais mention des 2 églises précitées à cause de l'incommensurable valeur historique de chacune pour les français qui se sont établis en Amérique. En plus de cela, j'ai longtemps cru que Jean Rolandeau et Marie Thibault avaient célébré leur mariage à Notre-Dame-des-Victoires. Permettez-moi un petit frisson, je m'y étais sentimentalement attaché. Étant donné que nos ancêtres se marient en 1680, et en tenant compte du registre paroissial publié plus haut, je me rends à l'évidence, le mariage a eu lieu à l'endroit où est située l'actuelle Basilique-Cathédrale de Québec.

Tenir compte de l'importance historique de ces lieux n'appartient pas à la catégorie des propos futiles. Ils ont vu naître LE pays. Quand vous marchez autour de Notre-Dame-des-Victoires, vous marchez, aussi, autour de l'Habitation de Champlain. Quand vous marchez autour de Notre-Dame-de-Québec, vous suivez les pas de nos premiers ancêtres qui, le coeur heureux et agité, se dirigeaient aux portes de l'église afin de se marier. Comme retour aux sources, c'est plutôt "la totale" ça . . . non?

Je ne m'aventurerai pas à écrire les histoires "des Notre-Dame". Vous le savez, je ne possède pas les acquis ni les lumières de l'historien. Par contre, si les premiers pas de votre pays vous intéressent et éveillent un petit chatouillement en vous, hop! Cliquez ici . . . le temps investi vous rendra plus malin . . .

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1. Livre source:
Vivre, aimer et mourir en Nouvelle-France, André Lachance, Libre Expression 2000, page 87

2. Je peux affirmer
que les règles de base, pour une bonne partie des Laurendeau rencontrés depuis plus d'une décennie, ne s'appliquent pas. Aimantés par un profond désir "d'adapter la norme", les Laurendeau sont portés à copier et même à développer ce gène de l'ancêtre : faire les choses autrement et ceci, parfois, avec l'entêtement le plus divin . . . le plus charmant . . . voire ensorcelant . . . et même souventes fois, fort piquant . . .

2a. On se souvient
que l'ancêtre Jean avait reçu une première concession de deux arpents de terre de front en la seigneurie de Dombourg donnée par le seigneur Jean François Bourdon. Jean a assurément rencontré sa douce Marie durant cette période car la seigneurie de Dombourg et celle de Maure sont voisines.

3. Les connaisseurs
du maître Gilles Vigneault savent beaucoup de choses à propos du temps qui passe.

4. Habituellement, en 1680,
les maisons sont de 6 mètres sur 8, sans solage et pas très solides. Les murs sont construits de pièces de bois blanchies à la chaux, et le toit en planche est couvert de chaume ou bardeaux de cèdres.

5. Livre source
Vivre, aimer et mourir en Nouvelle-France, André Lachance, Libre Expression 2000, page 78 et 135

6. Livre source
Vivre, aimer et mourir en Nouvelle-France, André Lachance, Libre Expression 2000, page 100 et +

7. Redire et répéter le mot préféré, juste au cas où vous ne l'auriez pas encore remarqué

8. Source des images:
Actes d'état civil et registres d'église du Québec: Paroisse Notre-Dame de Québec 1679-1690; Ancestry.ca

9. Livre source
Vivre, aimer et mourir en Nouvelle-France, André Lachance, Libre Expression 2000, page 94

10. Temps de jeu:
À l'église, pendant l'échange des engagements, parents et amis surveillent les autres membres de l'assistance, afin que personne ne noue l'aiguillette, c'est-à-dire ne fasse un noeud à une ficelle, car le marié pourrait être frappé d'impuissance. C'est ce qui s'est produit, semble-t-il, lors du mariage, en 1657, à Montréal, de Pierre Gadois et Marie Pontonnier. Un ancien prétendant de Marie, René Besnard, dit Bourjoly, aurait noué l'aiguillette pendant l'échange des engagements et rendu ainsi son rival impuissant. Après trois ans d'essais infructueux, Marie et Pierre n'ayant pu "consommer" leur mariage, et cela même après avoir fait bénir de nouveau leur union, le juge du tribunal ecclésiastique, l'officiant, l'abbé Charles de Lauzon, en conformité avec le droit canonique, "après avoir fait les poursuites et enquêtes nécessaires", le 20 août 1660, annula ce mariage "pour cause de l'impuissance perpétuelle causée par le maléfice". Il permit aux deux époux de se remarier chacun de leur côté, ce qu'ils s'empressent de faire. Le maléfice qui pesait sur eux disparut aussitôt, puisque Pierre eut quatorze enfants avec sa nouvelle conjointe Jeanne Besnard . . . et Marie, onze, avec Pierre Martin . . .
Source: le livre Vivre, aimer et mourir en Nouvelle-France, André Lachance, Libre Expression 2000, page 100

11. Le témoin de Jean Rolandeau
est Pierre Jonqua. Originaire de la Gascogne, il était alors le deuxième voisin de l'ancêtre.

12. Mot illisible
qui pourrait être équivalent à document.

13. Henri De Bernières,
d'origine Normande, devient le premier curé de Québec. Lire plus sur l'homme et son oeuvre ici. (visité le 2 novembre 2016) Aussi, OpenLibrary publie un livre sur Henri De Bernières (visité le 2 novembre 2016).

14. Rajotte dans le PRDH

14a. Le 2 avril 1680 tombe réellement un mardi
consultez ce précieux site il donne le jour d'à peu près n'importe quelle date. (visité le 6 mai 2014 et le 2 novembre 2016)

15. Les notes biographiques du Notaire Rageot sont ici (visité le 6 mai 2014 et le 2 novembre 2016)

15a. Source:
Archives nationales - Viger - Notaire Gilles Rageot, bobine M36-3 #2049

On ne peut s'empêcher de vieillir, mais on peut s'empêcher de devenir vieux

Dixit le peintre, graveur et sculpteur français, Matisse

Petits bonheurs du temps jadis en image

Monseigneur Laval
En 1680, lors du mariage de Jean Rolandeau et Marie Thibault, Saint François de Montmorency-Laval, ou Monseigneur de Laval, est évêque de Québec. Il est alors âgé de 57 ans.
Source de l'image: Wikipedia (visité le 2 novembre 2016)

Basilique Notre-Dame de Québec
Basilique Notre-Dame de Québec.
Source de l'image: Site Gosselin (visité le 2 novembre 2016)

Place Royale
La Place Royale suite aux bombardements anglais de 1759.
Au centre, l'église Notre-Dame-des-Victoires.
Source de l'image: Commission des Champs de Bataille Nationaux (visité le 2 novembre 2016)

Vue de Québec
Vue de Québec [détail] en 1699 / Jean-Baptiste-Louis Franquelin.
Source de l'image: Archives Canada (visité le 2 novembre 2016)

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